samedi 1 octobre 2016

27 JOURS POUR FRANÇOIS VILLON… « Dracula, Tarzan, Napoléon, Tintin, Gainsbarre, François Villon… »


Dracula, Tarzan, Napoléon, Tintin, François Villon ont ceci en commun qu’ils vampirisent littéralement qui s’approche d’un peu trop près de leur mythe.
Souvenons-nous de l’acteur Béla Lugosi qui dormait dans un cercueil, possédé qu’il était par le vampire qu’il incarnait pour Universal Picture.
Il fut enterré dans la cape du comte Dracula ( ! ) …
Et qui se souvient de Johnny Weissmuller, le plus grand des Tarzan ?…
A vrai dire, le seul, l’unique, tant il aura marqué le rôle !
Il finit sa vie accroché au rideau de sa maison de retraite en poussant son fameux cri !… Possédé, vampirisé, lui-aussi par le rôle !
On ne compte plus le nombre de dingues qui se prirent pour Napoléon ou pour sa version super héroïque : Bonaparte.
Albert Dieudonné qui tenait le rôle dans le chef d’œuvre d’Abel Gance, était paraît-il légèrement dérangé du bicorne… L’aura de Napoléon est telle que l’empereur et le général ont pu avoir les traits de Pierre Mondy, de Sacha Guitry, de Patrice Chéreau et même de Christian Clavier ! Pourquoi pas De Funès ou Paul Bréboist ?… D’ailleurs, si on observe le paysage politique contemporain, on ne manquera pas de repérer un petit énervé qui souffrirait du syndrome que ça ne m’étonnerait pas…
Et que dire de Tintin ?… Un masque… Une enveloppe que chacun peut habiter… Fille… Garçon… Peut importe… Quiconque lit Tintin est Tintin. Coup de génie d’Hergé ! Magie de la ligne claire si rassurante, si évidente…
Gainsbourg expliquait comment après avoir fabriqué et adopté le masque de Gainsbarre, celui-ci lui colla tellement à la peau qu’il ne put le retirer.
C’est ce que montre, entre autres choses, l’excellent film de Joann Sfar, « Gainsbourg, vie Héroïque ».
Et Villon dans tout ça ?…
Ceux qui très tôt, se sont passionnés pour Villon à travers ses œuvres, se sont trouvés comme « happés »… Happés par le fantôme du poète qu’ils se projetaient et qui, invariablement, ne pouvait être qu’un reflet d’eux-mêmes et d’une époque, d’une culture.
De Tristan Tzara à Jean Teulé en passant par Marcel Jullian, innombrables sont ceux qui s’identifièrent à l’idée qu’ils se faisaient du personnage. Tous brûlèrent d’envie de dire : « Je, François Villon ».
Et des idées, il est tentant de s’en faire… Du turlupin farceur dont Rabelais conte les « franches repues » au troubadour miséreux et consumé d’amour que crurent ressusciter les romantiques… on le vit en truand aguerri, en tombeur de ces dames… On en fit le très savant rédacteur de messages codés… Le fils caché de… En quoi ne le vit-on pas ?… Certains prétendent même qu’il n’a jamais existé… comme Molière.
Il faut dire que l’incertitude de l’état civil du 15ème siècle favorise ce genre de révision puisqu’on le trouve, tour à tour identifié sous le nom de François des Loges, de Montcorbier, de Monterbier… Certains l’ont même reconnu sous le nom du coquillard : Simon le double. « Si » pour « six », c’est-à-dire « VI » en chiffres romains ; « m » pour « maître », « on » pour la fin du nom Villon et « le double » pour les deux « L ».
?…. ?…..
Mouais. Je ne sais qui du « Club des cinq » ou de « Sherlock Holmes » a eu cette brillante intuition… Mais avouons que tout ça est un peu tiré par la tignasse.
Une chose est certaine, Villon est le nom qu’il a emprunté au chapelain Guillaume qui l’a recueilli et de qui il dira « qu’il lui a été plus doux que mère »…
Invoquant l’emploi fréquent de l’antiphrase par le poète, certains historiens prétendent d’ailleurs, qu’il faut entendre par là que Guillaume de Villon aurait caressé le jeune François d’un peu trop près… Et voilà comment le bon maître Guillaume, chapelain de Saint-Benoît-le-Bétourné, irait rejoindre le grand chapelet des prêtres pédophiles.
On ne peut décidément plus se fier à personne.
L’image de Villon comme celles des grands personnages porteurs de mythes est donc modifiable, ajustable et toujours hypnotique.
Brassens n’y échappa pas. Adolescent, il voulut sans doute pour s’approcher de la légende du mauvais garçon érudit, se faire avec quelques copains, lui aussi, « un peu voleur ».
Il évoque cette anecdote dans la chanson
« Les quatre bacheliers »

« Nous étions quatre bacheliers
Sans vergogne,
La vraie crème des écoliers,
Des écoliers.

Pour offrir aux filles des fleurs,
Sans vergogne,
Nous nous fîmes un peu voleurs,
Un peu voleurs. »

Dans la réalité des faits, comme « tonton » Georges se voyait mal commettre un fric-frac pour piquer quelque chose, il préféra triompher sans risques en subtilisant des bijoux de sa sœur Simone. Il serait ainsi auréolé de gloire auprès des malandrins de pacotille avec qui il avait formé une bande… de bras cassés.
L’affaire tourna court, car ces coquillards d’opérette, furent rapidement identifiés et le bon peuple de Sète, les aurait volontiers accrochés à Montfaucon si le gibet eût été plus près et s’il n’avait été détruit en des temps fort anciens…
Bref, l’effet Villon avait joué à plein.
On remarquera le vocabulaire employé dans la chanson :
« bachelier » comme Villon bien que Brassens n’ait eu que le B.E.P.C.
« écoliers » comme Villon qui évoque souvent la condition d’écolier.
« voleur » comme Villon flanqué de sa légende coquillarde.

Et moi qui vous cause, moi qui me suit immergé très tôt dans l’œuvre du « mauvais   enfant », si je n’ai jamais été tenté par la truanderie, je dois avouer qu’à une certaine époque (lointaine !), j’avais une certaine propension a adopter une espèce de « coupe de cheveux à la Villon »… J’aurais aimé connaître le merlan de Depardieu à l’époque des « Valseuses »…
Heureusement, ça m’est passé très très vite car je me suis rapidement aperçu que les simulacres et le mimétisme ne me rapprochaient en rien du personnage. D’autant plus que d’après certaines instances autorisées (à se foutre de ma gueule !) la coupe «page » ne m’allait pas du tout !
Comme l’a dit Patrick Font dans son langage fleuri :
« C’est pas parce qu’on a du poil aux fesses qu’on pète en latin ! »
Méditez poilus, chevelus, barbus de toutes obédiences et adeptes de « déguisements » plus ou moins baroques … Méditez !

Villon, on peut s’en approcher mais seulement s’en approcher.
Même chez Pierre Champion qui fut l’un des plus prestigieux historiens à avoir étudié l’œuvre et l’homme, on trouve des appréciations morales liées à son éducation, à son ressenti d’homme de la fin du 19ème siècle et du début du 20ème.
Pour ma part, à travers « François Villon, corps à cœur », mon intention n’est pas d’amener quelque révélation définitive et incontestable sur le personnage. J’espère faire œuvre de « passeur »… Je serais heureux qu’après la lecture du livre et l’écoute du disque, certains aient envie d’en savoir plus et de découvrir avec la délectation que j’ai pu en retirer, les poésies de maître François.
Comme je l’ai dit précédemment c’est une œuvre vertigineuse, intemporelle… Elle offre de multiples  possibilités  d’interprétation.
Et, pour qui a le goût de l’Histoire, l’étude, de la langue et de la société de l’époque réserve bon nombre de surprises et de découvertes.
L’une des plus singulières qu’il m’ait été donné de faire dernièrement, c’est de constater que le peintre anglais préraphaélite, Dante Gabriel Rossetti avait adapté dans la langue de Shakespeare « La ballade des dames du temps jadis ». Ce qui donne « The Ballad of dead ladies ».
Or, dans le “Monsterland” paru chez Yil dernièrement, j’évoque Rossetti dans une nouvelle intitulée « Les bijoux du Diable » et cette nouvelle est accolée à une autre, « L’anastomose » dans laquelle il est question de Villon et notamment du vers « Deux étions et n’avions qu’un cœur. »
Au moment où j’ai rédigé ces textes, j’ignorais l’existence de l’adaptation de Rossetti.
Etonnant, non ?…
Alors… ondes… convergence de centres d’intérêt… hasard… ? ?
Donnez à ça l’explication que vous voulez … et même, n’en donnez pas !

Et Daraquy dans tout ça ?…
Est-ce que lui aussi, ne serait pas un peu possédé par l’esprit de Villon ?
Je dirais qu’il ne le risque pas car c’est lui qui possède le personnage !
Bruno est si proche de l’idée qu’on peut se faire de Villon qu’il n’a pas besoin de chercher à s’y identifier. Son talent d’interprète et de comédien fait le reste.
Voici ce qu’il déclare dans l’entretien qui figure à la fin de « François Villon, corps à cœur » :
« Il se trouve que je suis un peu comme Villon ou Couté, un type en marge.
Je n’aime pas l’ordre établi. Je traverse la vie comme un étranger, sans boussole…
Chez Villon ou Couté, je suis un peu chez moi.
Ensuite, bien sûr, il y a un peu de travail ; interpréter ces textes sans grossir le trait alors qu’ils vous y incitent constamment, rester maître de l’interprétation sans se noyer dans chaque mot ou dans l’émotion constitue pour moi le plus délicat. »
Le « un peu de travail », je vous invite a venir en profiter dès que Bruno se produira avec ses musiciens…
En attendant vous pouvez toujours vous faire une idée du spectacle en lisant l’article de Michel Kemper : http://www.nosenchanteurs.eu/index.php/2012/04/29/bruno-daraquy-pcc-francois-villon/

Vous pouvez suivre la progression de l’ouvrage mais aussi trouver des extraits du livre, des illustrations et des documents sur :



http://fr.ulule.com/francois-villon/

http://fr.ulule.com/francois-villon/



 


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