« LES HEURES JOYEUSES » par Laurence Kleinberger / illustration de couverture : Joblin
Des gens qui prennent la pose, y’en a plein.
Des gens qui tiennent la prose, y’en a moins.
Laurence Kleinberger fait assurément partie de cette
deuxième catégorie.
D’ailleurs de prose, il en est fortement question dans son
nouveau roman. … De prose et de plumeau car il y est démontré que l’un ne va
pas sans l’autre… et même que l’un va dans l’autre.
J’ai évoqué précédemment la truculence, la fantaisie et
l’inventivité louftingue de la Laurence, toutes ces qualités servies par
un style cousin de celui d’un Boris Vian ou d’un Bertrand Blier – un vrai
style, quoi… -
Et j’ai toujours le même plaisir à illustrer les couvertures
de ses livres.
Dans « Les heures joyeuses » que vit un trio
féminin ; entre deux déconnades, affleure l’angoisse existentielle de
l’être aux autres, de cette saloperie de temps qui passe et qui casse
tout : les rêves, la beauté, la jeunesse, les apparences… car, comme le
disait Brassens : « le temps est un barbare dans le genre
d’Attila » (« Les lilas »).
Alors, pour bien nous consoler, la Kleinberger nous a
concocté un cocktail du tonnerre de Spritz, une histoire abracadabrantesque,
une poilade majuscule, un vrai livre de Noël ! À l’instar de tonton
Hitchcock qui excellait à nous faire sursauter de terreur quand on s’y
attendait le moins, l’auteuse vous promène gentiment par la barbichette et vous
colle soudain une petite baffe amicale. Comme ça… pour rigoler… Vous portez la
main à votre joue, elle est déjà en train de vous botter le fion façon clown.
Des surprises, des galipettes, des virevoltages, des
voltefaces, des libertés, des fausses pistes, des renversements de situations,
de l’inattendu. Y’a tout ça sous le crépitant clavier de Laurence. Ça
emballe ! Ça déménage ! Ça embraye ! Ça tressaute ! Ça
détale ! Il se pourrait même qu’elle ait écrit le premier roman quantique,
tant l’imaginaire, la réalité, l’imaginative se télescopent comme autant de
multivers. On y croise même « Juliette, la chanteuse », à moins que
ce ne soit son fantôme…
Laurence arrive à retranscrire cette drôle de sensation
onirique qui fait que dans un rêve, lorsqu’on rencontre quelqu’un que l’on
connaît bien, nous lui parlons tout en nous disant que cette personne ultra
familière ne ressemble pourtant qu’un peu à celle que nous côtoyons dans la
vraie vie…
Moi je sais que les écrits de l’autrice se nourrissent de
vrais morceaux d’existence - ce qui rend la lecture encore plus savoureuse - et
puis il y a cette réflexion sur le fait même d’écrire tout en nous livrant une
(des) histoire(s) gigogne(s)… Des reflets de reflets… Des tiroirs dans les
tiroirs… Quand l’imaginaire génère de la réalité, de l’irréalité et … de
l’hilarité ! Les sous-entendus, les
blagues, les remarques amusées et amusantes ; tout ça tombe comme une
grêle de bulles. Ça fait POP et PATAPOP ! Ça fait POUP POUP PEE
DOUP ! Ça pulse et ça fait des
fois PROUT au nez de la vie terne.
J’ai parlé de Vian et de Blier ; on peut convier Perec et Buzzati tant le livre-même
devient le sujet, l’objet de lui-même dans une fin tout à fait stupéfiante et
décoiffinouillante qui aurait fait éclater de rire un Frédéric Dard, lui
qui s’amusait à un imprimer certaine page de San Antonio en lui faisant opérer
une rotation horaire, puis la page suivante à l’envers, puis la suivante en rotation
horaire à nouveau, puis la suivante en anti-horaire… avant de recommander au
lecteur de cesser immédiatement sa lecture s’il se trouvait dans un train sous
peine de passer auprès des autres passagers pour un fou qui confond un bouquin avec
un volant…
C’est bien dans ce genre de magasin de farces-et-attrapes que
se déroulent « Les heures joyeuses » .
Le livre de Laurence Kleinberger est comme un cake généreux
plein de fruits confits et déconfits… Un délictueux délice dont le Woody Allen
de « La rose pourpre du Caire » lui aurait refilé la recette.
C’est étonnant ! C’est épastrouillant !
Des gens qui prennent la pose, y’en a plein.
Des gens qui tiennent la prose, y’en a moins. Laurence Kleinberger est de ceux-là.
« Les heures joyeuses » par Laurence Kleinberger MVO
Editions Livres Blancs
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