samedi 20 décembre 2025

 

« LES HEURES JOYEUSES » par Laurence Kleinberger / illustration de couverture : Joblin 



Des gens qui prennent la pose, y’en a plein.

Des gens qui tiennent la prose, y’en a moins.

Laurence Kleinberger fait assurément partie de cette deuxième catégorie.

D’ailleurs de prose, il en est fortement question dans son nouveau roman. … De prose et de plumeau car il y est démontré que l’un ne va pas sans l’autre… et même que l’un va dans l’autre.

J’ai évoqué précédemment la truculence, la fantaisie et l’inventivité louftingue de la Laurence,  toutes ces qualités servies par un style cousin de celui d’un Boris Vian ou d’un Bertrand Blier – un vrai style, quoi… -

Et j’ai toujours le même plaisir à illustrer les couvertures de ses livres.

Dans « Les heures joyeuses » que vit un trio féminin ; entre deux déconnades, affleure l’angoisse existentielle de l’être aux autres, de cette saloperie de temps qui passe et qui casse tout : les rêves, la beauté, la jeunesse, les apparences… car, comme le disait Brassens : « le temps est un barbare dans le genre d’Attila » (« Les lilas »).

Alors, pour bien nous consoler, la Kleinberger nous a concocté un cocktail du tonnerre de Spritz, une histoire abracadabrantesque, une poilade majuscule, un vrai livre de Noël ! À l’instar de tonton Hitchcock qui excellait à nous faire sursauter de terreur quand on s’y attendait le moins, l’auteuse vous promène gentiment par la barbichette et vous colle soudain une petite baffe amicale. Comme ça… pour rigoler… Vous portez la main à votre joue, elle est déjà en train de vous botter le fion façon clown.

Des surprises, des galipettes, des virevoltages, des voltefaces, des libertés, des fausses pistes, des renversements de situations, de l’inattendu. Y’a tout ça sous le crépitant clavier de Laurence. Ça emballe ! Ça déménage ! Ça embraye ! Ça tressaute ! Ça détale ! Il se pourrait même qu’elle ait écrit le premier roman quantique, tant l’imaginaire, la réalité, l’imaginative se télescopent comme autant de multivers. On y croise même « Juliette, la chanteuse », à moins que ce ne soit son fantôme…

Laurence arrive à retranscrire cette drôle de sensation onirique qui fait que dans un rêve, lorsqu’on rencontre quelqu’un que l’on connaît bien, nous lui parlons tout en nous disant que cette personne ultra familière ne ressemble pourtant qu’un peu à celle que nous côtoyons dans la vraie vie…

Moi je sais que les écrits de l’autrice se nourrissent de vrais morceaux d’existence - ce qui rend la lecture encore plus savoureuse - et puis il y a cette réflexion sur le fait même d’écrire tout en nous livrant une (des) histoire(s) gigogne(s)… Des reflets de reflets… Des tiroirs dans les tiroirs… Quand l’imaginaire génère de la réalité, de l’irréalité et … de l’hilarité !  Les sous-entendus, les blagues, les remarques amusées et amusantes ; tout ça tombe comme une grêle de bulles. Ça fait POP et PATAPOP ! Ça fait POUP POUP PEE DOUP !  Ça pulse et ça fait des fois PROUT au nez de la vie terne.

J’ai parlé de Vian et de Blier ;  on peut convier Perec et Buzzati tant le livre-même devient le sujet, l’objet de lui-même dans une fin tout à fait stupéfiante et décoiffinouillante qui aurait fait éclater de rire un Frédéric Dard, lui qui s’amusait à un imprimer certaine page de San Antonio en lui faisant opérer une rotation horaire, puis la page suivante à l’envers, puis la suivante en rotation horaire à nouveau, puis la suivante en anti-horaire… avant de recommander au lecteur de cesser immédiatement sa lecture s’il se trouvait dans un train sous peine de passer auprès des autres passagers pour un fou qui confond un bouquin avec un volant…  

C’est bien dans ce genre de magasin de farces-et-attrapes que se déroulent « Les heures joyeuses » .

Le livre de Laurence Kleinberger est comme un cake généreux plein de fruits confits et déconfits… Un délictueux délice dont le Woody Allen de « La rose pourpre du Caire » lui aurait refilé la recette.

C’est étonnant !  C’est épastrouillant !

Des gens qui prennent la pose, y’en a plein.

Des gens qui tiennent la prose, y’en a moins.  Laurence Kleinberger est de ceux-là.

« Les heures joyeuses » par Laurence Kleinberger MVO Editions Livres Blancs

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